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11 novembre 2010 4 11 /11 /novembre /2010 21:21

imagesCA5KASMREn République Dominicaine, on croit que certains leaders haïtiens affirment que « l’île est une et indivisible » alors que c’est la Constitution Haïtienne qui le dit. Le plus vraisemblable, est que cette phrase fait seulement référence à la partie occidentale, car il faut se remémorer que Haïti était divisée en trois régions et que, grâce à l’influence de Boyer, elles s'unirent au XIXième Siècle. De ce point de vue, les deux parties de l’île étaient conscientes de leurs différences ethniques et culturelles.

 

Dans la  tentative, de créer notre identité, de nombreux historiens ont « sauté » des épisodes de notre réalité en tant que pays, sans lesquels il est impossible d’avoir une vision objective du problème identitaire. Depuis le début du XIXème, il s’est développé deux mouvements parallèles dans la société                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                         dominicaine et dont la majorité de la population perçoit comme un, de sorte que tous les dominicains de l’époque poursuivaient les mêmes objectifs alors que la réalité est toutr autre.

 

Le premier de ces mouvements était le « mouvement indépendantiste » et le second la « lutte des classes ». Pendant que le premier fut très étudié, du second on a peu d’informations – ce qui peut induire à une erreur historique-. Bien que la partie Est de l’île était peuplée par des mulâtres, des blancs et des noirs, tous ne jouissaient pas des mêmes droits, ni ne possédaient les mêmes moyens économiques.

Durant l’Indépendance, une partie des criollos cherchaient l’indépendance politique d’avec l’Espagne afin de maintenir leurs privilèges, d’autres cherchèrent à se maintenir sous la protection de « la Mère Patrie », les mulâtres cherchaient l’égalité avec les blancs et les noirs, liberté et égalité avec les mulâtres.

C’est le motif pour lequel la Première République en 1821 fut un échec, fruit de la rareté de la cohésion sociale et résulta en « l’invasion » de Boyer en 1822.    

 

Les propriétaires criollos dans leur grande majorité, n’appuyaient pas Nuñez de Caceres car ils étaient pro-espagnols, la nouvelle Constitution n’abolissait pas l’esclavage et reconnaissait encore moins l’égalité entre mulâtres et blancs, alors que les mulâtres composaient la majorité de la population. La fameuse invasion de 1822, ne fut pas tant cruelle et impitoyable comme le narrent certains livres, mais plutôt une bonne histoire pour intensifier la haine envers les haïtiens. Cette « invasion » s’effectua avec la collaboration d’une partie de l’élite dominicaine pour expulser les français et avec l’aide des haïtiens pour préserver leur récente liberté. C’est le motif pour lequel José Nuñez de Caceres donna ou plutôt a offert les clefs de ville à Jean-Pierre Boyer.

Il est évident que le projet de nation de nombreux criollos n’incluait pas toute la population. D’ici vient l’origine de la célèbre phrase « dominicano de pura cepa » qui faisait en fait référence aux dominicains ayant un aspect physique criollo (hispanique) et non à tous les dominicains comme il se croit dans les classes populaires.

 

Après l’Indépendance de 1844, on peut observer la même instabilité  politique, en relation directe avec l’absence de projet pour le pays. Ni les annexionnistes, ni les duartistes / indépendantistes ne faisaient référence à l’égalité pour tous les dominicains. Le résultat fut l’annexion à l’Espagne en 1861 sous le commandement du conservateur Pedro Santana et le fusillement de certains symboles de la partie libérale et progressiste de la société dominicaine comme la mulâtre Maria Trinidad Sanchez ou le noir José Joaquim Puello. Du fait d’être le mouvement libéral le plus représentatif entre les classes populaires, Santana a favorisé l’immigration de personnes de « race blanche » afin –dans le but- de contrer les exigences d’intégration des mulâtres et des noirs, conseillé en cela par le Consul français de l’époque Saint-Denys. 

 

C’est pendant la dictature de Trujillo que s’est consolider l’idée actuelle de l’identité dominicaine et s’amplifia la pensée de « purifier de la race »

A cette époque, le racisme et la antipathie qui existaient antérieurement envers les haïtiens s’intensifièrent, en cause Trujillo (mulâtre complexé), qui consolida la version hispanique de la société dominicaine, oubliant le caractère « métissé » de la majorité de la population. Sous sa dictature, tout le monde connaît les difficultés qu’avaient mulâtres et noirs dominicains pour accéder aux postes à responsabilités dans le gouvernement et les institutions officielles. Cette manière de créer l’identité dominicaine avantagea les personnes de peau claire, qui eurent moins de difficultés au moment de progresser économiquement.

Dans notre pays, où malheureusement l’éducation est traditionnellement défaillante, beaucoup des étudiants qui terminaient un cycle universitaire n’étaient pas toujours les plus compétents, mais plutôt ceux dont les parents pouvaient payer les études universitaires.

 

Trujillo encouragea l’immigration de juifs européens, d’exilés républicains de la Guerre Espagnole, d’italiens, de japonais et descendants européens d’autres pays d’Amérique Latine. Tous ces gens ne le savaient pas, mais ils faisaient partie d’une double stratégie camouflée sous des motifs humanitaires : « purifier la race » et créer une barrière de couleur contre les haïtiens.

 

L’obsession de Trujillo de « purifier » ou « blanchir la race » lui a valu le titre honorifique de « Défenseur de l’identité dominicaine ».

Biologiquement, l’obscurissement de la peau sous les Tropiques répond à une stratégie d’adaptation au milieu, comme le rappelle la vitamine D, un fait que nombreux défenseurs de la Théorie Tri-raciale oublient de mentionner. Sous les climats froids, c’est tout le contraire. Il suffit juste de comparer les afro-américains qui vivent au nord des Etats-Unis ou en Europe avec ceux qui vivent aux Antilles. Nombreux sont les dominicains qui ont immigrés aux Etats-Unis et en Europe, qui ont vu leur peau « s’éclaircir ». Lorsqu’un de ces immigrés se rend de nouveau en République Dominicaine, il a alors l’étrange impression que les gens sont plus noirs.  

 

Superficiellement, le phénotype et l’étiquette raciale peuvent changer et ce du à des facteurs du milieu ambiants comme les rayons ultraviolets du soleil qui affectent la couleur de la peau (mélanine) ou l’humidité pour la texture des cheveux. Avant le XVIème siècle, les populations de peau noire vivaient quasi exclusivement sous les Tropiques ou en Afrique Noire et celles-ci se sont « éclaircies » á mesure de leurs migrations vers des climats modérés ou plus froids.

En Amérique, ce n’est pas ainsi à l’arrivée des premiers européens, car dans cette zone se sont déjà établis des asiatiques de teint clair, ancêtres des natifs américains, il y a 30.000 ans. La distribution géographique de la couleur de la peau que nous pouvons observer aujourd’hui est le fruit des migrations, non de la sélection naturelle.

 

Ce n’est un secret pour personne que pour Trujillo l’entrée d’haïtiens sur le territoire dominicain constituait « une invasion pacifique » qu’il fallait éviter par tous les moyens. Cette haine connut son summum lors du triste épisode de 1937, qui se solda par l’assassinat – d’entre 15.000 et 20.000 haïtiens.

Certains croient encore que le véritable motif de ce massacre était d’éviter un complot depuis Haïti dans le but de le destituer et organisé par des Dominicains. En réalité, Trujillo maintenait une relation d’amour / haine avec les haïtiens. D’un coté il les reniait et de l’autre il formait des accords avec François Duvalier (1958) ou avec Elie Lescot, portant sur la protection mutuelle des deux pays. Trujillo n’a pas lésiné sur les moyens et les manœuvres pour créer une idéologie anti-haïtienne basée sur des mensonges, des stéréotypes et des préjudices.

Nous sommes, nous les dominicains, tant « Tigueres » que sommes capables de nous réinventer l’Histoire si celle-ci ne nous intéresse pas ; pour cela ce lamentable acte fut catalogué comme « l’acte le plus important de l’Histoire de la dominicanidad dans l’actualité de ce siècle »

 

Chapita tenait une addiction aux poudres cosmétiques afin de paraître plus blanc. Son obsession était telle qu’il obligeait à modifier ses photos et portraits. Joaquim Balaguer, le disciple de Trujillo, continua avec le projet de la création de l’identité selon le modèle de son maître durant ses célèbres « Douze Années » Haïti se convertit en parfait bouc émissaire, une bonne excuse qui nous oublier le problème principal – de fond -. Même si les haïtiens n’existeraient pas, le problème racisme, lui persisterait.

Cet anti-haïtien s’est convertit en un modèle à suivre, une manière de revendiquer la « dominicanidad ». Par cette voie de négation identitaire, nombreux sont les dominicains qui en sont venus à croire que les noirs sont uniquement les haïtiens. Et juste pour cela , peuvent être discriminés.

 

Alcides Pimentel Paulino

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